Olivier GIROUD

Olivier GIROUD

Olivier Giroud né en 1943 en Dauphiné, vit et travaille près de Vienne (Isère).
Après des études à l’IEP de Grenoble, il apprend le travail du métal dans différents ateliers et de la terre à Ratilly (Yonne) de 1967 à 1969.
Il expose depuis 1972 en province, à Paris et à l’étranger et est présent dans différentes collections publiques et privées. Il a réalisé des œuvres de grande dimension pour des commandes publiques, notamment à Lyon, Auxerre et Hannovre.
Par ailleurs, il conçoit et réalise du mobilier. Il crée des formes pour le jardin et dessine les objets de L'Orangerie.

Voir le site d'Olivier Giroud: www.oliviergiroud.fr
 


Principales expositions :

 

2022 Galerie Mirabilia (printemps 2022), avec Anna Mark, Lagorce (Ardèche)
         Galerie Pome Turbil, Thonon-Les-Bains

2021
Cloître de l'Ancien Carmel, Villeneuve d'Ascq

2020, Galerie um Fridbësch, Luxembourg

2019
Galerie Bruno Mory (Besanceuil); Galerie La Navire, Brest

2018 
Galerie Pomme Turbil, Lyon; Autour d'Alexandre Hollan: légèreté et matière,
          La Fabrique du Pont d'Aleyrac, Saint-Pierreville (Ardèche); Galerie Bruno Mory

2017
Abbaye d'Aubazine, avec Anna Mark, Aubazine, Corrèze; Galerie Bruno Mory; 
         Galerie de La Praye, Fareins (Ain)

2016
Maison de Brian, Simiane la Rotonde; Chateau de Fareins (Ain);
         Cuiseaux (Saône et Loire)

2015
Galerie La Navire, Brest;

2014
Galerie Mirabilia, Lagorce; Galerie Inside-out, St Rémy de Provence

2013
Andrésy: sculptures en l'île, Parc de l'hôtel de ville; 
          Galerie Pome Turbil / Art espace, Lyon


2012
Musée du cloître, Tulle (Corrèze), Architect@work, Halle Tony Garnier, Lyon

2011
Musée Hébert, La Tronche (38)

2010 Galerie Art-Espace, Thonon les Bains;
Ensemble conventuel de Charrière,
         Châteauneuf de Galaure

2009 Eglise St-Pancrace de Bans, Givors

2008 Galerie Art–Espace, Thonon les Bains;
L'art devant soi, Galerie Sabine Puget,
         Fox Amphoux (Var)


2007 Galerie Mirabilia, Lagorce;
Le Chemin des 5 sens, Le Cheylard (Ardèche)


2006 Galerie Art–Espace, Thonon les Bains

2006 Rencontres contemporaines, Treigny (Yonne) ; Galerie WM, Lyon;

         Terre et Feu, Galerie Sabine Puget, Fox Amphoux (Var)


2004 Galerie Art- Espace, Thonon les Bains


2003 Merzig, Musée Schloss Fellenberg, Allemagne
;

         "Matières", Fort de Vaise, Lyon

2002 Prieuré de Dixmont (Yonne);
Château de Mamer, Luxembourg


2001 Galerie Art-Espace, Thonon les Bains


1996 École des Beaux-Arts, Toulouse;
Galerie S., Dieulefit;
Villa Ekternest, Belgique


1994 Musée du Cloître, Vienne


1993 Galerie du Ressort, Paris


1992 Espace Interrogation, Toulon

1991 Château de Ratilly (Yonne)


1990 Centre d’Art contemporain, Villefontaine (Isère)

1989 Galerie Athisma, Lyon
1988 Galerie Petersen, Thonon les Bains

1987 Kunstbygnning, Arhus, Danemark ;
Galerie Jane de Verner, Malmö, Suède


1984 Musée Jean Cousin, Sens

1983 Galerie Arto, Vienne

1981/ 1985/ 1990 galerie Böwig, Hanovre, Allemagne.


1978 Atrium de la Part-Dieu,Lyon


1972 / 1982 Maison de Lyon




Catalogues



- Maison de Lyon, texte de François Boddaert, 1982
- Villefontaine, texte de Henry Nesme, 1990

- Château de Ratilly, textes des poètes François Boddaert, Lorand Gaspar, Paol Keineg,
 Jacques Lacarrière, Jean de Maisonseul, Pierre Oster, James Sacré, 1991
- Musées de la ville de Vienne, textes de Roger Lauxerois, Lorand Gaspar et Olivier Giroud, 1994
- Terres, Musées de la région Rhône-Alpes, photos J. Salmont, textes J.P. Spilmont, Editions Comp’act, Chambéry, 1994

- Olivier Giroud / Textes de Jean Planche et Paul de Roux, Galerie WM  à Lyon et Galerie Art-Espace à Thonon, 2006


- Bois debout, sculptures d'Olivier Giroud / Laurence Huault-Nesme, ed. Musée Hébert; catalogue de l'exposition juin-octobre 2011.
- Olivier Giroud, Sculptures en l'île, ed. Ville d'Andrésy, 2013

 

Poésie



Si peu de terre, tout / James Sacré, Editions le Dé bleu, 2000

 


Olivier Giroud

 La Part de l’inconnu


Jean Planche, février 2022

 

 Lorsqu’une sculpture me convient et qu’elle est finie, je ne sais pas d’où elle vient. Je ne peux pas en démarrer une autre à sa suite, je ne peux pas m’appuyer sur celle que j’aime puisque je ne sais pas d’où elle est venue.


(Olivier Giroud, Notes d’atelier)

 

 

Ce fut peut-être la première belle ouvrage d’Olivier Giroud : une automobile que très jeune il construisit par lui-même. Manifestant ainsi, outre le désir et la capacité d’entrer dans la réalité d’un fonctionnement, un goût profond pour une autarcie un peu sauvage qui se concrétisera notamment, plus tard, par la réalisation, en acier, de mobilier et  de machineries dont l’efficacité laisse toujours une place à une poétique joueuse.

 

Après le métal, il apprend à travailler la terre, et, dès la fin des années 60, ouvre un atelier où il se fait sculpteur, non sans confectionner en parallèle, avec Isabelle, sa femme, de très grands et très beaux pots d’orangerie. Malgré la frontière établie, il nous semble pourtant que dès ce moment-là les parallèles se joignent. Poteries et sculptures de terre partagent un même four, construit de plus par les mêmes mains. Ce qui ne veut certainement pas dire, cependant, que ce ne soit pas une tout autre affaire : cette terre qu’il travaille « en la frappant, en l’écrasant », c’est bien en sculpteur qu’il en affronte « les formes massives et pesantes ». La « terre rétive » qu’évoque François Boddaert  demeure attachée à son intégrité, elle « s’enlace en son dedans », comme l’écrit Claude Esteban. La séparation est le premier acte, l’ouverture. Le second sera de la « dresser comme un mur ». Demeurent, pour les travaux anciens, les marques de rondeurs tranchées comme autant d’ombilics.

 

« Puis je l’ouvre », dit Olivier. Mais non sans y avoir auparavant inscrit une géométrie qui parfois la pénètre et tantôt l’enveloppe. (Les pots eux-mêmes seront soumis au cercle et au carré.) Des failles, des fissures sont de possibles voies vers un intérieur qui se refuse et se promet. Pour « entrer là », selon l’expression d’Olivier, il faudra, peut-être, la rencontre avec un désir d’architecte. Celui de « laisser passer la lumière », de « porter le regard sur l’intérieur ». Un besoin de construire. Et de « mettre l’espace à l’intérieur », comme le disait, à propos de sa « Montagne vide », le sculpteur Chillida, dont Olivier Giroud découvrit l’oeuvre en 1974, au château de Ratilly dans l’Yonne. Il en naît un univers paradoxal où « la lumière s’introduit dans les murs qui devraient lui faire obstacle ».

 

Il apparaît un désir symétrique chez le grand architecte nippon Tadao Ando, dont nous visitâmes ensemble une exposition à Paris, quand il écrit à propos d’une oeuvre précoce, sa « Guerrilla House » à Osaka : « Ce à quoi je voulais me mesurer, c’était la ville pleine de contradictions et qui ne pouvait être gouvernée par les théories transparentes du modernisme ; ce que je voulais créer, c’était un espace irrationnel, rempli d’une vitalité mise à nu : lorsque j’y repense, je crois que j’avais l’impression de faire de la sculpture plutôt que de l’architecture. » Tel est bien le point de rencontre : créer un espace dont on peut faire l’expérience sensible et physique à la fois, par l’esprit et par tout le corps ( les Japonais parleront de « shintai »). On pourra se faire a contrario une idée de ce qui heurte le shintai lorsque, sans raison claire, on ressent comme hostile, jusqu’au malaise parfois, un lieu, un bâtiment. Autre notion essentielle, le « ma » désignera l’intervalle, la durée, mais aussi le lieu de rencontre. En témoignent les petites cours intérieures par lesquelles Tadao Ando aime relier les parties d’un habitat et où, dit-il, on peut ressentir, venu du dehors,  « quelque chose de grandiose ». Ou encore cet espace entre les objets dont Olivier a su voir qu’il est, dans les natures mortes de Morandi, d’une telle justesse que ceux-ci « sont comme en lévitation et vous attirent dans l’apesanteur ».

 

Mesurer ainsi les choses de tout son corps, ce n’est pas, comme l’enseigne l’Occident, faire de l’homme la mesure de toute chose. C’est encore moins enfermer ce corps de sensations dans une image en miroir, bordée de sentiments catalogables et de figures héritées. Le refus de la figuration chez Olivier Giroud pourrait bien être un quasi-iconoclasme : un essentiel dépouillement, sans appui, sans savoir, pour répondre à l’injonction de l’inconnu, et trouver là son bonheur. Dès lors que le rêve poursuivi n’est rien de moins que d’établir «  le lieu d’un continent préservé », « le siège d’une pensée possible », on comprendra qu’il faille écarter les interprétations trop humaines, tout comme on doit renoncer autour de soi à tout aménagement qui manque de la nudité nécessaire. Les poteries elles-mêmes, qui seront pourtant accueillies ensuite dans les plus beaux jardins et de prestigieuses demeures, sont d’abord exposées à l’austérité vraie d’un dehors sans ornement.

 

Quand lhumain  est présent tel qu’en lui-même, on y reconnaîtra surtout la justesse d’une attitude, la valeur exacte d’un entre-deux. Comme, à l’été 2011, au Musée Hébert, à La Tronche/Grenoble, où, dans un beau parc avec vue sur lAlpe, de grandes sculptures de bois étaient réunies sous le titre « Bois debout ». Grands pans de cèdre massif découpés à même des troncs et présentés là par paires dressées à la verticale. Comme entre parenthèses, il y eut aussi, en bois, des blocs blessés et disjoints, découpés en dents de scie, des scarifications profondes, des entailles, à la tronçonneuse.

 

La puissance fibreuse de l’arbre trouve nécessairement en nous un écho, et, par sa masse et sa peau, le matériau impose sa présence. Mais la forme s’en émancipe : les stèles faites de blocs de bois aboutés ont leur répondant dans des modules de terre empilés. Des assemblages de bois taillé seront accompagnés de modules de terre blanche davantage formalisés, présentés appuyés les uns sur les autres. En attente, dirions-nous, pour la construction, peut-être, d’une de ces cités désirables que semblent préfigurer des assemblées de terre où je crois retrouver les villes que révèle une lumière d’apparition au fond de bien des paysages de Poussin - quelque Jérusalem céleste qui est à rebâtir.

 

 

Exposition Galerie Mirabilia, été 2014

Comme s'était formée naguère autour d'un grand maître du fer et de la terre, Eduardo Chillida, une haie de poètes , il s'est construit un moment autour de l'œuvre de terre d'Olivier Giroud un château de poésie. François Boddaert, notamment, disait la « terre rétive » qui requiert le feu pour se pétrifier. Tandis que Jean de Maisonseul y désignait des « failles d'ombres ». Que  Jacques Lacarrière voyait « des porches et des portiques ouvrant sur le temps fracturé », et Paul de Roux des « monuments impénétrables », alors même que James Sacré  trouvait en eux « comme un endroit qu'on peut rentrer dedans ». Cette contradiction dernière nous semble essentielle aux travaux d'Olivier Giroud. Et l'« articulation à l'autre », « comme si on pouvait procéder de l'intérieur », que lisait en ces travaux Lorand Gaspar pourrait bien être ce qui fournirait une clef hors du temps pour ces sanctuaires et ces villes aux allures orientales hésitant entre ruine et jeu de construction qu'évoquent  les ouvrages en terre chamottée – ziggourats, ksour, kasbahs, médinas. Leur accès est toujours « multiple et bifurqué », comme le disait Dupin pour Chillida – labyrinthique. 

Dédale l'ingénieux trouve en Olivier Giroud un avatar, mais qui  n'ignore pas que c'est à l'impossible que doit s'ajuster la mécanique humaine, pour que se puisse insinuer en son cœur la respiration du vide, du désir, la vie en somme. Cependant qu'avec les bois dressés la puissance  ligneuse affirme sa capacité à dessiner des courbes amples tirées au plus fin de l'équilibre. On y cherchera un appui sur l'instable même, en une syncope où risque et liberté ont intimement partie liée. Sculptures ou architectures, ces oeuvres de terre ou de bois creusent, dans l'espace où nous logeons nos réalités, un suspens pour ce qui existe sans raison.                                                       

Jean Planche, été 2014

 

 Dès ma première rencontre avec les sculptures d’Olivier Giroud, je les ai spontanément associées à l’idée que je me suis fait au proche et au plus lointain Orient du sanctuaire. Abri, refuge, matrice qui accueille notre fatigue et notre dispersion, nos soucis comme nos joies, et nous invite à rentrer en nous-mêmes, - double retraite. Pourtant, tout sanctuaire (en premier celui de notre corps–esprit si nous sommes capables d’y entrer, d’y prendre conscience vraiment) n’est-il pas essentiellement un lieu d’ouverture et d’articulation à l’autre, à toutes choses, dans le vaste tissage extérieur, et plus encore par notre possible enracinement. Par le même geste qui compose et dégage des formes dans ce qui à nos yeux est épaisseur et opacité de la matière, la main du sculpteur articule le sensible et l’intelligible, le physique et le métaphysique, nous permettant de toucher et de voir une fermentation, une ferveur qui habituellemnt nous échappent. 

Lorand Gaspar in: Catalogue, Musée de la ville de Vienne, 1994

 

On parle de l’urbanisme, de cette capacité enfin entrevue de vivre les cités, de ne plus les subir en les habitant. Le sculpteur redevient alors une autre définition de l’architecte. Le travail sur, et dans le matériau n’est plus une affaire d’esthétique : c’est enfin la célébration des peuples dans leurs villes. Certains murs d’Olivier Giroud font inévitablement appel à nos visions de Mycènes, de Sacsahuaman et aux cairns d’Armorique. Bâtisseurs, simplement bâtisseurs, ils n’entraient pas dans le jeu des catégories, ni architectes, ni sculpteurs… Mais ils construisaient une géométrie à dimensions humaines, qui accordait la nécessité à l’ordre du monde, faisant ainsi l’éloge des dieux, dans une réduction pratique mais pure, recréation craintive de l’ordonnance céleste.

François Boddaert

 

 

 

 

 

 


ŒUVRES DE Olivier GIROUD