YANKEL

YANKEL

Né en 1920, Jacques Kikoïne dit YANKEL est le fils du peintre Michel Kikoïne. Après une courte carrière de géologue, il se consacre à la peinture, au dessin, à la sculpture et à toutes sortes d'assemblages.
Comme en témoigne le critique d’art Gérard Xuriguera « son oeuvre parvenue graduellement à maturité, il n’en finit pas de traquer les images et les émois qui traversent son existence : En toutes circonstances, dans la rue, au Japon, aux Etats-Unis, en Afrique où à Tahiti, il observe le spectacle du monde de son œil gourmand, éternel curieux, continuellement émerveillé par les objets les plus humbles, les paysages les plus insolites. C’est un collectionneur impénitent d’œuvres naïves, appellation qu’il réfute, de masques et d’objets d'art africain, d’ustensiles voués au rebut, d’artistes contemporains. »
Yankel nous a quittés en avril dernier, quelques jours avant de fêter ses cent ans. Les évènements organisés avec le soutien du Département de l'Ardèche permettront de rendre hommage au peintre  qui avait choisi Labeaume comme refuge, lieu propice à sa création, et de faire découvrir son œuvre au fil d’une saison, dans différents lieux du département.

Un livre est édité à cette occasion: Une saison Yankel, éditions du Pin, 2020 avec les textes de Christian Bontzolakis, Tassadite Favrie, Dominique Thibaud et les photos de Matthieu Dupont.

Portrait de Yankel:
crédits photos: Département de l'Ardèche-Matthieu Dupont


Principales expositions :


Texte complémentaire

YANKEL (Jacques Kikoïne, dit)

(1920-2020)

L’énergie créatrice de Yankel est immense. L’art est sa quête de toujours, sa recherche quotidienne et son aiguillon de vie. Chaque jour, il dessine ou peint, colle, transforme un ancien tableau, découpe une lithographie pour en faire un collage, assemble objets, vieux chiffons et pinceaux empreints de peinture ; il dessine et peint la vie en couleurs avec un talent sûr.                                                                                           In : une saison Yankel, éditions du Pin, 2020

Jacques Kikoïne naît un 14 avril 1920 à Paris. Son père, le peintre Michel Kikoïne, juif russe émigré à Paris depuis 1912, s’est installé à La Ruche, célèbre phalanstère d’artistes fondé par le sculpteur Alfred Boucher dans le XVème arrondissement de Paris. Yankel passera ses années d’enfance et de jeunesse aux côtés de Soutine, Modigliani, Chagall, Krémègne, Léger… Un bain de culture et de vie collective qui sera le fondement de son parcours de créateur. Il exerce différents petits métiers dans des ateliers d’imprimerie et de gravure puis s’attellera, pendant la guerre, à des études de géologie. En 1949, il est nommé au Sahara en tant que géologue-hydrologue et aura pour mission de dresser la carte géologique de la région Gao-Tombouctou-Tabankort. C’est sur ce terrain qu’il rencontre Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre ; ce dernier l’encourage à abandonner le marteau du géologue pour le pinceau du peintre. Il rentre à Paris avec la résolution d’être peintre, fort de cette phrase que Jean Paul Sartre lui dédie : « Le choix que l’homme fait de lui-même s’identifie avec sa destinée ».

 

Pour se distinguer de son père, Michel Kikoïne, membre reconnu de l’Ecole de Paris, il prend le surnom de YANKEL, terme yiddish affectueux pour appeler un enfant « mon chéri ». Il s’installe à nouveau à La Ruche et fait sa première exposition en 1952 à la Galerie Lara Vinci. En 1955 il connaît ses premiers succès en tant qu'artiste. Il gagne le prix Neumann qu'il partage avec Réginald Pollack, le 1er prix de la Société des Amateurs d'Art ainsi que le prix Fénéon. Il travaille aux côtés de Paul Rebeyrolle,
Simone Dat, Michel Thompson, pratiquant un réalisme expressionniste. Il découvre l’Ardèche en 1953 grâce à son ami peintre Orlando Pelayo et acquiert en 1955 la Coconnière à Labeaume, qui deviendra son village d’adoption.

 

Les premières peintures (1950), travaillées dans l’épaisseur de la matière, aux couleurs sombres et profondes se tracent un chemin entre figuration et abstraction et disent les influences des grands peintres qui ont impressionné Yankel : Rembrandt, Chardin, et plus proches dans le temps l’expressionisme d’un Soutine, de Kikoïne, son père et l’influence des peintres amis, Rebeyrolle, Clavé, Buffet, Doucet, Szafran: Portrait de Madame Amos Le coq d’Inde etc…

 

La palette s’éclaircit dans les années 60, sans doute est-ce l’effet de la lumière du Sud et de la liberté que lui procure sa vie intermittente en Ardèche, comme dans cette grande toile à l’huile de 1966,  Baigneuses à Labeaume, ou ce carré Bleu ciel. L’influence de Nicolas de Staël, peintre qu’il admire, est sensible.

 

Après la mort de son père en 1968, il revisite les thèmes bibliques chers à Michel Kikoïne – la Fiancée juive, Thora, Moïse et Aaron … dans des peintures à l’huile et des gouaches flamboyantes. C’est aussi l’année de son entrée à l’Ecole des Beaux arts de Paris, comme professeur ; en cette période bouleversée, ce sont les étudiants qui le choisissent pour sa démarche d’artiste et sa personnalité hors norme.
Il y restera 17 ans !

 

Sur la période 70-80, Yankel mêle les techniques dans une grande liberté, associant en un même tableau  peinture et collage de fragments de dessins et de lithographies telle l’oeuvre, Palimpseste.

Les années 90 seront celles de l’explosion libératrice : Yankel délaisse toile et chevalet pour mieux assembler dans de grands « Reliefs » sur bois, objets, dessins, rouillures et matières de toutes sortes. Le tableau sort du cadre, devient reliquaire ou ex-voto, à l’instar de ce que Yankel collectionne avec passion sur les marchés aux puces où il dispute parfois une pièce à son ami Gérard Lattier. « L’œil du collectionneur et celui du peintre fusionnent » (Christian Bontzolakis in : Une saison Yankel, éditions du Pin, 2020).

 

Cette exposition met également à l’honneur une œuvre d’exception :
A Corps joie, livre de peinture réalisé par Yankel entre 1999 et 2000.

L’objet-livre est à l’origine un recueil réunissant sur une année les numéros de l’hebdomadaire agricole Le Sillon de Seine et Marne, reliés sous couverture cartonnée au format imposant de 60 cm de haut par 45 cm de large.

A la suite d’une mauvaise fracture de l’humérus gauche, Yankel est immobilisé pendant plusieurs mois. Il  utilise alors ce support « ready-made » comme viatique à sa créativité entravée mais néanmoins débordante. L’artiste réalise une double-page par jour durant les longs mois de sa convalescence. Par le choix des couleurs, le geste plus ou moins rapide, les outils graphiques et techniques utilisés, il marque dans ces pages, avec un talent sûr, l’humeur du jour.

 

Yankel œuvre avec spontanéité, exubérance et une intuition des rapports de couleurs qui nous éblouit. On sent l’urgence du geste dans sa façon de libérer le trait ou de déployer un aplat de couleur. Reviennent en tête ces mots du peintre : « Ma peinture c’est comme ma vie, je peins comme si je devais mourir demain… à toute vitesse… »

 

Son travail a donné lieu à de nombreuses expositions à travers le monde, de Paris à New York via Tokyo, Amsterdam, Londres, Bruxelles,  Genève, Oran, Abidjan, Sao Polo ….,  mais aussi en Israël.
Les galeries Lara Vinci, Gérard Mourgue, Drouant-David, Romanet, Félix Vercel, Charpentier, et surtout Yoshii ont présenté son œuvre multiforme : peintures, dessins, pastels, lithographies, ou encore tapisseries, décors de théâtre, sculptures, vitraux, reliquaires. 

 

Parallèlement à ses activités de peintre, Jacques Yankel a noté ses  souvenirs nourris de réflexions sur l’art et sur la  vie, et a croqué des dessins accompagnés de collage - fragments de lettres et photos, dans des recueils atypiques comme Le Désespoir du peintre, Peintre sans rire, Pis que peindre… Par ailleurs, il a contribué à créer, par des donations successives, un intéressant musée d'art naïf à Nogent-sur-Serein (Yonne).
Il nous a quittés quelques jours avant de fêter ses cent ans, en avril dernier.

 

Ses œuvres font partie des collections publiques :

 

Eglise romane de Balazuc, Vitraux 

Fondation Jeanne Matossian, Musée des Beaux arts de Chartres

Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts de Paris

Musée d’Art Moderne de la ville de Paris

Musée Sainte Croix, Poitiers

Musée des Augustins, Toulouse

Musée Héléna Rubinstein, Tel Aviv ; Israël

Musée de l'Athénée, Genève

Musée d’Art Naïf, Noyers sur Serein

 

Dominique THIBAUD,

Galerie Mirabilia, Lagorce, Ardèche

 

 


ŒUVRES DE YANKEL